Le bon usage: »fair », « challenge » et autres anglicismes

De retour d’une réunion du Cercle des Cadres Expatriés, Philippe O’Logue signale à notre attention deux mots, »fair » et « challenge » sur le bon usage desquels il souhaite avoir des éclaircissements ainsi que plusieurs « perles » attribuables à l’inattention des locuteurs.

« Fair »

L’emploi de ce mot dans cette phrase: « Ce n’est pas « fair » de refuser l’usage de la liste d’adresse … » est incorrect. Le mot « fair » n’existe pas en français. A la place, il faut dire soit « juste » ou encore « équitable ». En effet, par contraste, l’expression « You are unfair » se traduit bien par « Vous êtes injuste ». Mais, objecterons certains, n’employons nous pas en français l’expression « fair play » alors pourquoi pas « fair »? L’Académie française n’a pas voulu mettre cette expression dans son dictionnaire car, selon le Trésor de la langue française, il s’agit d’un anglicisme « mal assimilé dans notre langue ». Alors, a fortiori, le mot « fair » seul doit être banni!

« Challenge »

Lorsqu’un intervenant dit « déterminer la rentabilité des entreprises post crisis est un vrai challenge« , on sait que « post crisis » est tout simplement un anglicisme plus élégamment remplacé par  » à l’issue de la crise » en français mais qu’en est-il du mot « challenge »? Ce mot existe bien en français mais pas dans le sens de la phrase. En français moderne un « challenge » selon le Trésor de la langue française est une   » Épreuve périodique entre deux sportifs ou deux équipes pour la conquête d’un titre ou d’un trophée (coupe, statue, etc.) que le vainqueur garde en dépôt, puis cède au vainqueur d’une nouvelle épreuve. Lancer, gagner un challenge; faire disputer un challenge. ».Le sens sportif du mot nous vient de l’anglais : vers 1380 le mot anglais « challenge », emprunté au vieux français, avait pris le sens de « défi dans un combat ». En ancien français, le mot « chalongier » ou « chalengier » signifiait « chicane, attaque, défi » (XIIe s.).Le mot provenait  du latin classique calumnia terme juridique « accusation fausse, chicane » formé sur le participe du verbe « caluor » = »chicaner, tromper » puis « réclamation, accusation, litige » en latin médiéval.

Ainsi, pour être correct, il convient d’employer le mot « défi » pour traduire « challenge » sauf si le contexte sportif permet l’emploi du mot « challenge ».

Autres perles

On ne dit pas « on n’est pas « flooded »  » mais « on n’est pas inondé », « on demandera aux participants de « clearer »  » mais  » d’approuver », « le stimulus package » mais « le plan de relance », « un backlash politique » mais « un retour de manivelle » ou « une réaction négative », « on peut se retrouver avec les « sovereign funds  » comme actionnaires » mais  » avec les fonds souverains », « comprendre ce qui est operating  et non-operating » mais  » ce qui ressort ou non du résultat d’exploitation ».

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Le bon usage: « trilliards » « trillions » et autres anglicismes

Récemment, mon ami Philippe O’Logue assistait à une réunion du Cercle des Cadres Expatriés, tenue, me disait-il, comme à l’accoutumée dans un grand restaurant de New York. Franco-américain, vivant dans un milieu anglophone, Phil a toujours veillé à ne pas mélanger les deux langues. Contrarié par ce qu’il décelait être soit des fautes de français soit tout simplement des anglicismes résultant de la paresse des locuteurs, il m’a soumis une liste de « perles » pour commentaires.

Trilliards

La crise actuelle nous oblige à jongler avec des sommes défiant l’entendement. Plusieurs intervenants, pour signifier « mille milliards » soit « trillion » au sens américain (trillion=1000 billions) ont utilisé le vocable  » trilliard ».Est-ce une faute? Oui sans doute aucun: le mot n’existe pas dans notre langue dans ce sens. Face à une difficulté linguistique, ces intervenants ont crée un néologisme par  emprunt  et dérivation provenant de l’anglais: pour calquer la progression américaine de « million «  à « billion » et à « trillion », ils ont allègrement progressé de « million » et « milliard » à « trilliard ».Notons que le mot « billion » pour signifier « milliard » est parfaitement accepté selon Le Trésor de la langue française .

L’usage du  mot « trillion » pour  signifier « mille milliards » a été également relevé, en particulier dans la bouche d’un expert financier français. Malheureusement, cet emploi n’est plus permis depuis 1948.Auparavant, quoique vieilli, le sens de « trillion » était « mille milliards« . Ainsi, le Capitaine Haddock dans Le Trésor de Rackham le Rouge aurait fort bien pu s’exclamer « un trillion de sabords » au lieu de  » mille millions de mille sabords » mais l’effet n’eût pas été le même! Cependant, depuis la IXe Conférence générale des Poids et Mesures, réunie à Paris en 1948, le mot « trillion » pour les pays européens doit être utilisé dans le sens de  » un milliard de milliards «  soit  10 puissance 18.C’est la définition reprise par Le Robert.Il faut donc employer l’expression « mille milliards » pour traduire le « trillion » américain. On est donc en droit de se poser la question lorsqu’un journal, ou un locuteur, francophone utilise le mot  » trillion «  du sens voulu par l’auteur ou par le locuteur. Ceci est d’autant plus vrai que selon la même Conférence le mot « trilliard« ,certes d’un usage rare, doit signifier une quantité égale à 10 puissance 21 soit « mille millards de milliards »!Dans la même échelle,adoptée par le Royaume-Uni,le mot « billion » réfère à une quantité égale à 10 puissance 12 soit égale au « trillion  » américain. Une autre illustration de l’observation de G.B.Shaw : »England and America are two countries separated by a common language. »

Dans les vicissitudes de la crise, nous ne pouvons qu’être soulagés que les « trillions »  engloutis pour la rescousse de certaines sociétés n’aient pas eu le sens du Robert!

Compensation et rémunération

Phil nota qu’un intervenant, explicant comment la crise touchait les cabinets d’avocats, déclara que « la compensation des associés » avait subi une diminution. Il ne faut pas confondre « compensation » en anglais qui signifie « rémunération » et « compensation » en français qui veut dire  » rétablir l’équilibre entre deux choses complémentaires ou antagoniste » ou, en droit et en finance, « annulation réciproque de créances, jusqu’a concurrence de la plus faible, lorsque les deux personnes sont respectivement débitrices et créancières l’une de l’autre ».

Autres « perles »

Phil nota quelques expressions qui, selon lui (et selon moi) relevaient de la paresse: « ma société termine l’année flat », « on a vu un shift », « nous vendons des produits qui ne sont pas inexpensive » ou encore, ô comble, « mon core business était down ».Il y a de quoi rester pantois devant un tel  laisser-aller qui témoigne d’une imprécision croissante de la langue, voire de la pensée. Ceci est d’autant plus regrettable que l’éminence du français comme langue diplomatique et culturelle provenait de la précision de l’expression que l’on pouvait attendre d’elle.

Stipendier

Voir: Pierre F.de Ravel d’Esclapon

Eradiquer et Eradicate

If you yearn to learn the difference between « eradiquer » and « eradicate » read Pierre F. de Ravel d’Esclapon

Realiser et realize

Pierre F.de Ravel d’Esclapon


Diane Dufresne

Pour connaitre et apprecier le joual rien de tel que Diane Dufresne:

La Bolduc

La Bolduc est une des meilleurs exemples de chansons quebecquoises traditionnelles

Traditional Quebec songs

Les amateurs de musique pourront comparer le style de chanson d’Ouvrard dans Je ne suis pas bien portant avec celui de Marthe Fleurant chantant les chansons de la Bolduc

Les faux amis de la gastronomie

Our English-speaking friends will find delectable David Gaillardon’s  chronicle in the Sunday Times.He explores with humor and erudition the faux-amis one might encounter in the kitchen or in the restaurant.

Signalons à l’attention de nos lecteurs l’excellente chronique de David Gaillardon dans le Sunday Times,parfois reprise dans Canal Académie,qui vous fera decouvrir le blancmangé de Guillaume le Conquérant et bien d’autres amis et faux amis culinaires: http://www.canalacademie.com/Les-faux-amis-de-la-gastronomie.html

Si vous voulez savoir si le gout du sucré est inné,lisez le compte-rendu d’un colloque tenu à Arbois tel qu’il apparait dans Canal Académie:

http://www.canalacademie.com/Plaisir-et-habitudes-alimentaires.html

Ce colloque a été organisé en juin 2007 à Arbois (Jura), dans le cadre des conférences du Pôle Innovation Alimentation Santé, une initiative de la Fondation de la Maison Louis Pasteur (fondation de l’Académie des sciences).

Pour la première fois de son histoire, une large partie de la population mondiale « ne court plus après les calories ». Ce changement fondamental a entraîné l’émergence de maladies dites de pléthores qui posent un véritable problème de santé publique.

Par ailleurs, les relations entre l’homme et l’alimentation ont fortement évolué. Lorsque nous nous nourrissons, nous ne faisons pas qu’absorber une quantité d’aliments. D’autres éléments entrent en jeu : le « comportement alimentaire » qui regroupe le moment qui précède le repas (sa préparation, les courses, la cuisine), les conditions de la prise du repas (ambiance, le nombre de personnes à table) et ce qui suit le repas (sensation de satiété, digestion). L’ensemble des évènements et l’émotion suscités autour des repas influencent le plaisir alimentaire et donc l’équilibre nutritionnel qui en découle.

Cerveau et Goût

par André Holley

André Holley, membre du Centre Européen des Sciences du Goût

Le goût correspond aux sensations produites par les sens gustatifs et olfactifs. Parmi les capteurs, on trouve en premier lieu les papilles, ainsi que des filets nerveux qui montent vers le cerveau.

L’odorat nous donne accès aux arômes. Ses molécules montent vers les cavités nasales et descendent dans les poumons.

L’ouïe aussi a son rôle à jouer ! Il nous permet d’apprécier le craquant, mais aussi la dureté d’un aliment (sensibilité musculaire).

N’oubliez pas le nerf trijumeau !

Le nerf tri jumeau est très important : il reconnaît les substances chimiques irritantes (moutarde, vinaigre, ammoniaque). Il permet de donner une valeur aux textures (croustillant, tendre). Il innerve aussi la douleur (il est responsable de vos rages de dents) !

L’homme possède 400 récepteurs toujours en activité (de l’ordre de 1000 pour les animaux).

Le goût : à quoi sert-il ?

Le goût est le gardien de l’entrée du tube digestif : en fonction des informations captées par les sens, l’individu choisit de poursuivre ou non la prise alimentaire.

Il a également une dimension affective : en agissant sous une forme de plaisir de déplaisir, il nous incite à manger.

Le sucre : un plaisir inné

Peu de gens résistent aux saveurs sucrées, et c’est normal ! Dès notre naissance des récepteurs chargés de capter tous les saveurs sucrées, sont en lien avec le cerveau et lui indique une information positive. À y regarder de plus près, les molécules ayant le goût sucré sont aussi celles qui sont riches en énergie. Ces récepteurs ont donc valeur de guide pour nous orienter vers un carburant essentiel à notre corps.

De même, nous avons une prédisposition innée à la valeur négative de l’amer.

Le cerveau conditionne les informations alimentaires de manière à faire le rapprochement entre deux événements : manger un aliment qui vous est agréable au goût mais qui vous rend malade à la digestion peut vous faire contracter une aversion à celui-ci !

Goût, plaisir et conséquences sur notre régime alimentaire

par Philippe Besnard

Philippe Besnard, titulaire de la chaire de Nutrition de l’ENSBANA

L’obésité est un problème mondial de santé public, touchant aussi bien les pays riches que les pays en voie de développement.

L’obésité correspond à un Indice de masse corporel (IMC). Celui-ci est calculé selon le ratio suivant :

Poids en kilos, divisé par la taille au carré = 65 kilos / 1.802

IMC :

– Inférieur à18 : maigreur

– De 18 à 25 : normal

– De 26 à 29 : surpoids

– Au-delà de 29 : obésité

Sur 270 millions d’Américains, plus de 100 millions sont obèses. Ils pourraient représenter 75% de la population à l’horizon 2030.

En France, 9% de la population est touchée. Les médécins s’inquiètent notamment de la monté de l’obésité infantile, passée de 5% en 95 à 16% en 2006 !

Transition nutritionnelle

Jusqu’au XXe siècle, les glucides (céréales, féculents, sucres lents) étaient très majoritaires, avant d’être consommés de manière plus modeste ensuite.

Si la consommation des protéines n’a pas beaucoup bougé, en revanche, les lipides montent en pic, conséquences des graisses cachées dans les produits carnés.

Si dans les années 1900, un homme consommait en moyenne 3500 calories par jour, aujourd’hui il n’en consomme plus que 2400. Mais nous sommes passés d’une alimentation riche en fibre et pauvre en graisse à l’exact inverse.

Accumulé à un manque d’exercice physique, vous obtenez un risque accru d’obésité avec toutes les conséquences médicales qui en résultent.

En France, l’alimentation destructurée correspond le plus souvent à une population défavorisée.

En France, avec 1 million de ménages vivent en-dessous du seuil de pauvreté (moins de 600 € par mois) et avec en moyenne entre 1 et 3 € par jour pour manger… le choix alimentaire est forcément restreint. Sont alors consommés en priorités des aliments riches sur un plan énergétique et peu chers, mais pauvres en apport nutritionnel.

L’obésité peut également avoir des origines génétiques, conséquence d’une mutation d’une protéine qui transporte une quantité de lipides importante.

Pyramide alimentaire

Pyramide alimentaire

Pour entretenir votre ligne et votre santé, il vous faudra :

– Manger plus !

* de produits laitiers

* de fruits et de légumes

* de céréales et de féculents : le pain n’est pas néfaste à la santé !

– Manger moins !

* de graisses saturées à éviter (ce qui ne veut pas dire qu’il faille proscrire toutes les graisses) : viennoiseries, pâtisseries, charcuterie, beurre, sauces et certains fromages

* de sodas

* d’alcool

Et marcher ! Vingt minutes de marche par jour suffisent pour entretenir votre organisme.

André Holley est Professeur émérite de l’Université Claude-Bernard, Lyon 1, membre du Centre Européen des Sciences du Goût (CESG) à Dijon, centre qu’il a dirigé de 2000 à 2002. Il a longtemps animé des recherches sur l’olfaction, avant de se tourner, plus récemment, vers le goût.

Philippe Besnard est Professeur des Universités titulaire de la chaire de Nutrition de l’ENSBANA, responsable du Laboratoire de Physiologie de la Nutrition. L’équipe de Philippe Besnard travaille sur la détection orale et l’absorption intestinale des lipides alimentaires.

En savoir plus sur :

– Le Centre Européen des Sciences du Goût

– L’ENSBANA, Ecole nationale supérieure de biologie appliquée à la nutrition et à l’alimentation

Welcome

Nous vivons dans un milieu où résister à la pression des anglicismes est une lutte constante.C’est pourquoi,dans ces pages,vous trouverez les observations de l’auteur sur le bon usage,les faux amis et l’histoire des mots et expressions de notre belle langue.
All who may be puzzled ,intrigued or fascinated by words , their origin,and their proper usage in French and English will find here food for thought.The good fight against the encroachment of English whenever a French word exists will be carried out by the author and his anonymously working cadre of observers.